Supports numériques assujettis à la redevance de copie privée : le Conseil d’Etat annule les barêmes fixés

La Haute juridiction s’est prononcée le 11 juillet 2008. Sans remettre en cause le principe de la redevance, elle admet que la Commission copie privée ne pouvait prendre en compte que les copies licites.

Ce sont d’abord les supports numériques vierges (tels que Minidisc, CD-R, RW audio ou DVD enregistrable) qui ont été assujettis à la redevance pour copie privée (Décision de la Commission du 4 janvier 2001).

Cette mesure a ensuite été étendue, le 4 juillet 2002, aux disques durs intégrés à des appareils d’enregistrement numérique (baladeurs, disques durs d’ordinateurs, etc.) puis, progressivement, à de nombreux autres supports numériques, au fil des décisions rendues par la Commission copie privée (actuellement Commission d’Albis) : (i) mémoires et disques durs intégrés à un baladeur ou à un appareil de salon et aux DVD enregistrables (décision n°7 du 20 juillet 2006) ; (ii) clés USB, disques durs externes et cartes mémoire (décision n°8 du 9 juillet 2007) ; (iii) supports de stockage externes à disque dits « multimédia » disposant d’une ou plusieurs sorties audio et/ou vidéo permettant la restitution d’images animées et/ou du son sans nécessiter l’emploi à cet effet d’un micro-ordinateur ainsi qu’aux supports de stockage externes à disque dits « multimédia » comportant en outre une ou plusieurs entrées audio et/ou vidéo permettant d’enregistrer des images animées et/ou du son sans nécessiter l’emploi à cet effet d’un micro-ordinateur (décision n°9 du 11 décembre 2007) ; (iv) téléphones mobiles multimédia (décision n°10 du 27 février 2008 qui prévoit une taxe « iPhone »).

Pour chaque support, la Commission a fixé un montant de rémunération fixé généralement par palier de capacité nominale d’enregistrement.

Ces décisions ont été vivement contestées, notamment par le Syndicat de l’Industrie de matériels audiovisuels électroniques (Simavelec) qui a déposé un recours en annulation devant le Conseil d’Etat portant sur la décision de la Commission copie privée n°7 du 20 juillet 2006. Il critique notamment les modalités de calcul du montant des redevances qui prennent en compte le préjudice subi non seulement du fait des copies licites mais également du fait des copies illicites de vidéogrammes ou de phonogrammes.

Le Conseil d’Etat s’est prononcé le 11 juillet 2008. Sans remettre en cause le principe de cette redevance, il admet que la Commission copie privée ne pouvait prendre en compte que les copies licites réalisées « dans les conditions prévues par les articles L. 122-5 et L. 311-1 du code de la propriété intellectuelle précités, et notamment les copies réalisées à partir d’une source acquise licitement ».

La Haute juridiction confirme ainsi, dans la ligne de la jurisprudence et de la doctrine antérieure, que le champ de l’exception pour copie privée est circonscrit au seul copiage d’une source licite. Par ailleurs, elle rappelle qu’il résulte de la combinaison de ces deux articles que « la rémunération pour copie privée constitue une exception au principe du consentement de l’auteur à la copie de son oeuvre » et qu’elle a ainsi « pour unique objet de compenser, pour les auteurs, artistes-interprètes et producteurs, la perte de revenus engendrée par l’usage qui est fait licitement et sans leur autorisation de copies d’oeuvres fixées sur des phonogrammes ou des vidéogrammes à des fins strictement privées ».

Ainsi, le Conseil d’Etat sanctionne la décision de la Commission qui « pour déterminer le taux de rémunération pour copie privée (…) tient compte tant de la capacité d’enregistrement des supports que de leur usage, à des fins de copies privées licites ou illicites, sans rechercher, pour chaque support, la part respective des usages licites et illicites (…) ». En d’autres termes, la Commission ne distingue pas entre la copie privée et le téléchargement sans droit. L’acte de téléchargement sans droit peut faire l’objet de poursuites judiciaires et ne saurait en aucun cas justifier un prélèvement, comme dans le cas d’espèce.

Cependant, le Conseil d’Etat a décidé que l’annulation de cette décision n’interviendrait qu’à l’expiration d’un délai de six mois à compter du prononcé de l’arrêt. Cette mesure exceptionnelle et inhabituelle procède d’un souci de protection de l’intérêt général (demandes de remboursement ou de versements complémentaires que les différents acteurs ne pourraient pas assurer)

L’arrêt du Conseil d’Etat est important car, en annulant les barèmes fixés pour les supports numériques concernés par la décision n°7 (baladeurs, enregistreurs de salons et DVD vierges), il impacte plus largement le mode de calcul de la rémunération qui a été mis en oeuvre pour toutes les autres décisions de la Commission copie privée. D’autres recours sont d’ailleurs pendants devant le Conseil d’Etat, notamment contre les décisions n°8, 9 et 10.

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